Impulser des écosystèmes d’acteurs, évolutifs et pérennes. Inscrire des initiatives locales dans des enjeux et des dynamiques plus larges. Créer des espaces et usages collectifs, en lien avec les usages du quartier…
Mon ambition est de créer des espaces de coopération et d’expérimentation au niveau local, à des échelles diverses.
Pourquoi créer des espaces de coopération et d’expérimentation ?
Plusieurs raisons apparaissent : Apprendre à vivre et faire ensemble. Recréer du lien et du sens. Développer l’intelligence collective et donc favoriser un impact plus important, plus pérenne aussi, de ces énergies déployées incroyables pour créer des initiatives collectives.
Plus pérennes… La coopération et la création d’écosystèmes, dans une démarche de biomimétisme, créent une inscription dans le temps long d’initiatives et de projets dont la richesse principale est la frugalité et l’innovation. Or ces expérimentations vont souvent de pari avec une certaine forme de fugacité. Le temps long et la pérennité ne peuvent être leur ligne de mire, afin de leur laisser la liberté de faire, de tester.
Dans de nombreux projets que je rencontre, cette tension entre le besoin de faire, d’expérimenter, au fil de l’eau, et le besoin de la collectivité, des financeurs, mes propres besoins de valoriser et de capitaliser, dans une construction et un apprentissage partagé, diffusé et donc sur le long terme, est palpable.
La coopération apporte une réponse à ces problématiques, elle génère de la résilience et de la pérennité, par deux aspects :
– En apportant une sécurisation et une plus grande solidité humaine, économique, politique parfois, aux différents projets et acteurs qui la composent.
– En partageant dans l’action, des apprentissages et savoirs, qui peuvent de proche en proche amener d’autres formes d’innovation.
Vers un délitement du portage du temps long
Je regardais le dernier #DataGueule, émission que j’aime beaucoup, sur les privatisations en cours depuis 1986. Le sociologue François Xavier Dudouet explique qu’une des causes et conséquences de ces privatisations est le fait que des hauts fonctionnaires migrent vers les grandes entreprises du CAC40, pour les diriger. La carrière de ces dirigeants repose sur une posture de bureaucrate et l’existence de l’Etat. Cependant, l’Etat devient moins attractif pour eux, financièrement bien sûr mais aussi en termes de pouvoir. Les discours renforcent ensuite cette idéologie, peut être pour résonner et justifier les mouvements personnels, que l’Etat n’est pas en capacité de faire son travail.
Ma réflexion en regardant cette vidéo est que la vocation de l’Etat et de ses bureaucrates réside dans ce temps long : construire une structure, inscrire et porter, y compris financièrement, l’intérêt général certes, mais surtout une vision à long terme.
Or, le déplacement d’énergie et de valeur depuis l’Etat, par le mouvement de ces bureaucrates, comme par les privatisations, questionne beaucoup sur la préservation de cette vision long terme. Une entreprise peut oeuvrer dans l’intérêt général, être bâtie sur des valeurs humanistes, écologiques, mais n’a pas vocation à porter ce temps long. Quelle entreprise privée par exemple conserverait des chemins de fer abandonnés, à perte, dans l’idée que dans 20, 30 ou 40 ans, nous en aurons peut être besoin parce que les déplacements ferroviaires s’intensifieront et la voiture individuelle s’éteindra ? Ce n’est ni leur adn, ni leur rôle.
L’impulsion de nouveaux espaces de coopération apprenants
La question que je me pose est comment répondre, à ma toute petite échelle, à ce délitement du portage sur le temps long, cette structuration lente, peu visible et souvent peu attractive pour les faiseux et entrepreneurs.
Je crois que créer des espaces de coopération et d’apprentissage sur des territoires entre des collectifs, entreprises, associations, chercheurs, collectivités, institutions qui veulent faire autrement est une opportunité de retisser du lien et de l’envie entre des actions longues, lentes, des réflexions et changements en profondeur, et des expérimentations vivaces, une envie et une capacité à faire.
Ils peuvent prendre différentes formes : des citylab, des tiers lieux, des programmations sur des îlots, processus de revitalisation de friches ou de centres bourgs, des jardins partagés, des maisons des agricultures urbaines, des mini-forêts urbaines, des quartiers pilotes, des recherche-actions…
Ces espaces nécessitent cependant une attention minutieuse sur deux éléments, au-delà de l’impulsion du projet en lui-même, pour se transformer en des espaces de coopération apprenants :
– la construction et l’évolution des connexions et synergies entre les différents acteurs et projets qui composent ces écosystèmes et avec les acteurs au-delà : leur gouvernance, leur interdépendances, leur nature possible, leur évolutivité, leur fin …
– la création d’espaces-temps de réflexion et de production de connaissances, d’évaluation des actions produites et leur diffusion, et parfois intégrer des acteurs qui les animent, les impulsent et les sécurisent.
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